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Comment Paul Biya tient Niat et Cavaye par Jean-Bruno Tagne

Cavaye Yeguié Djibril a été reconduit mardi dernier au poste de Président de l'Assemblée nationale. Pour la 22ème fois depuis 1992, il a été porté au perchoir à l'issue d'une élection au cours de laquelle il s'est imposé, comme tous les ans, avec un score soviétique: 153 voix sur 180. Il était encore, comme d'habitude, l'unique candidat à sa propre succession. 

La Constitution du Cameroun dispose en son article 16 qu'à l'ouverture de sa première session ordinaire, l'Assemblée nationale élit son président et son bureau. Ce qui signifie que chaque année, il faut passer au vote pour doter la Chambre d'un président. Pareil pour le Sénat. 

Depuis 22 ans donc, Cavaye Yéguié Djibril, aujourd'hui âgé de 74 ans, est chaque année soumis à la même épreuve de nerfs qui consiste à savoir s'il sera, oui ou non reconduit au perchoir. Un suspense entretenu par le Président national du Rdpc, seul maitre du sort de Cavaye et amplifié par la presse qui, chaque fois, l'annonce partant. En vain. 


Le rituel est classique. Les députés du Rdpc sont convoqués par leur secrétaire général au palais des Congrès quelque temps avant la plénière à l'Assemblée nationale. Et c'est au cours de cette réunion que le nom du candidat du parti au poste de Président de l'Assemblée nationale est annoncé. Chaque année, avec plus ou moins de surprise, c'est toujours le nom de Cavaye Yéguié Djibril qui est annoncé. A se demander pourquoi organiser tous les ans l'élection du bureau de l'Assemblée nationale et du Sénat alors qu'ils peuvent être élus une fois pour toute, dès la première session de leur mandat. 

Dans d'autres démocraties comme la France, le Bénin, le Togo, le Burkina Faso ou la Côte d'Ivoire, les bureaux des parlements sont élus une fois pendant toute la durée de leur mandat. Qu'est-ce qui peut donc justifier cette curiosité camerounaise? A qui profite-la précarité institutionnelle à laquelle la deuxième et la troisième personnalité de la République sont confinées? 

Selon un député Rdpc à l'Assemblée nationale, il s'agit d'une pratique camerounaise qui consiste pour le parti à tenir ses députés, pour s'assurer de leur «indéfectible soumission». «Personnellement, analyse-t-il, ce que je déteste le plus ici à l'Assemblée nationale, c'est le moment de renouveler le bureau. C'est du cinéma. Chaque année, on fait la même chose, on choisit les mêmes, on crée un faux suspense. Or, nous savons tous que c'est le Président national qui choisit qui sera président de l'Assemblée. 

En réalité, il est question de tenir les députés, de s'assurer leur docilité en échange de leur maintien. On se dit certainement que si un président est élu pour cinq ans, il peut se montrer dépendant vis-à-vis de la hiérarchie du parti. On préfère donc le soumettre aux élections chaque année» Alain Fogué, universitaire et homme politique, trésorier du Mrc, partage l'avis du député Rdpc. Il ajoute qu'il est question pour le Président de la République de s'assurer que tous les autres pouvoirs lui sont assujettis. «Je pense, soutient-il, que tout cela tient à la nature du régime camerounais. Il fonctionne sur la vulnérabilisation de tous les acteurs, sauf le Président de la République. L'objectif du pouvoir c'est de rendre tous les acteurs, même les plus importants, vulnérables, dépendants. Tout ce qui se passe à l'Assemblée nationale et au Sénat montre que le seul maître du jeu c'est Paul Biya, qui soumet tout le monde et tous les autres pouvoirs à sa seule volonté. Un président de l'Assemblée nationale ou du Sénat élu pour cinq ans, représente une menace pour un pouvoir habitué à torpiller les lois. Dès lors qu'ils savent qu'ils auront besoin du Président chaque année pour être reconduits, eh bien, ils ne font rien qui puisse le contrarier».
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